Cinquième séminaire de week end

Je ne m'impatientais pas spécialement de l'arrivée de ce séminaire.
Mes centres d'intérêt habituels absorbaient toute mon attention.
Il faut dire que depuis peu un nouveau groupe de parole s'était monté chez moi, et peut-être captait l'intérêt que j'investissais jusqu'à présent dans ce groupe de formation.
J'animais ce nouveau groupe à la façon d'Olga, notre facilitatrice "chef" (elle n'aimerait pas ce terme !) de formation, et je fus surpris de la facilité avec laquelle dès la première séance je me glissai dans ce moule.
Dans mon ancienne attitude d'animateur de groupe de parole, je veillais à ce que chaque participant respecte le plus possible les "règles Rogériennes" d'écoute et de "reformulation ".
Cela mettait une pression sur les participants, même si j'étais le plus discret possible.
Car les règles avaient été dites, elles constituaient une norme dont il fallait se rapprocher le plus possible, et j'étais énervé ou choqué par tous les manquements.
Cette fois-ci, je n'ai énoncé aucune règle, disant qu'au cours du processus de nos rencontres, chacun trouverait par lui-même la meilleure attitude pour aider l'autre.
Et à mon grand étonnement, je n'ai pas été choqué ni énervé par tous les manquements aux attitudes souhaitables fondamentales, j'ai été, disons, plutôt amusé et curieux.
(tout récemment (2010) une participante m’a dit qu’après avoir lu la description que faisait Rogers du facilitateur idéal, j’étais exactement ça !)


Je suis donc arrivé dans ce séminaire de formation presque indifférent, et percevant les autres d'une façon très différenciée : ceux ou celles que j'ai grand plaisir à revoir, les moyens ou neutres, et les négatifs.
Je me sens plein d'énergie, solide, et je suis perçu comme tel : on me le dit tout de suite.
Je m'installe plutôt dans l'écoute, n'ayant rien à dire qui me préoccupe.

Comme deux participants sont en retard, la facilitatrice stagiaire, Jackie, en profite pour se présenter.
Elle est de formation infirmière, et s'occupe à présent de l'accompagnement des personnes en fin de vie, de leurs proches, et de la formation à cet accompagnement.
De nombreuses questions sur son activité nous ont occupés une bonne partie de l'après midi.
Sa réponse à ma question de préciser ce qu'elle en avait retiré pour elle-même : Une plus grande faculté de vivre intensément l'instant présent.

Après son intervention un long silence s'est installé. Je suis décidé à ne pas intervenir personnellement, et suis curieux de ce qui va se passer.
C'est Olga qui intervient pour dire que peut-être on pourrait faire des sous-groupes, ou autre chose encore. Mais son intervention ne rencontre pas d'écho.
Enfin une participante, Annie, parle comme elle a pu aider efficacement par son écoute attentive, chaleureuse et aimante sa belle soeur, qui avait des difficultés relationnelles avec son mari, frère d'Annie.
A la fin de l'écoute donnée par Annie, sa belle soeur exprima avoir honte de s'être laissée aller ainsi, et notre apprentie écoutante nous fit part de son embarras devant ce sentiment : Par son attitude n'avait-elle pas poussé sa belle soeur à en dire plus qu'elle n'aurait voulu ?

Une autre participante, professionnelle de groupes de développement personnel, exprima aussi un doute similaire dans certains cas vécus par elle.
Olga intervint en précisant qu'il fallait bien tenir compte du cadre dans lequel on se trouvait avec la personne, s'il y avait ou non un contrat entre elle et nous.
On ne se comportera pas de la même façon dans un cadre professionnel et dans un cadre privé.

Nous nous retrouvons au repas du soir en ayant l'impression de n'avoir dit ni fait grand'chose, comme si tout le monde avait été endormi.
Il en était peut-être ainsi.

Au repas je me retrouve seul à une table face au 2e homme du groupe, qui était resté très en retrait cet après-midi, alors que d'ordinaire il intervient très facilement en premier, contribuant ainsi à "rompre la glace".
Nous parlons d'abord de banalités, puis je lui demande des nouvelles de celui qui avait quitté notre groupe récemment, et qui habite dans la même ville du nord que lui.
Il me répond qu'il n'en a pas, car il ne le connaissait pas avant de l'avoir rencontré dans ce groupe, et n'avait pas l'habitude de le fréquenter.
Il était plutôt centré en ce moment sur sa vie familiale, son travail, dont il me parla longuement, disant qu'il avait à ce sujet un besoin d'expression, mais qu'il n'avait pas senti cet après-midi dans le groupe les conditions favorables pour le faire.
Il y avait donc bien eu dans le groupe cet après-midi quelque chose qui n'avait pas collé.

Etait-ce l'intervention en premier de la nouvelle facilitatrice, qui avait drainé toute l'attention à son profit ?
En effet jusqu'à présent, les facilitateurs "de passage" restaient très discrets et en retrait pour ce qui les concernait personnellement, et c'était plutôt vers la fin du stage qu'ils étaient invités à parler d'eux-mêmes.
Et il faut dire que j'avais ressenti intérieurement une sorte d'agressivité, que je n'avais pas exprimé verbalement, à la prise de parole de Jackie.

Le lendemain matin, un grand silence s'installa encore. Je décidai à nouveau de ne rien dire. Après tout je m'étais déjà bien exprimé dans les séminaires précédents, ce pouvait bien être le tour des autres, ceux qui s'expriment souvent peu.
En y réfléchissant, je me dis que mon inimitié s'adressait plutôt à ces personnes-là, qui parlent peu.
Comme si cela me mettait en insécurité, la crainte d'être jugé, évalué.
D'ailleurs l'une d'elles ne me dit-elle pas régulièrement, à chaque début de nouveau séminaire : "Ah Yves, je trouve que tu as changé, que tu t'es ouvert, que tu t'es amélioré, etc..."
Comme elle ne dit rien d'elle même, j'ai l'impression qu'elle est là en observatrice dont je n'ai nul besoin, notant mes progrès et me donnant des bons points.
Comme si elle se situait au dessus de la mêlée, dans une sorte d'état de supériorité car elle-même aurait déjà résolu tous ces problèmes où nous nous débattons.
Je me doute bien que cela est faux, naturellement, mais je ne peux m'empêcher de le ressentir.
J'ai besoin qu'on me parle de soi pour être rassuré.

Cette fois-ci ce fut Jacquie qui interrompit le silence, en disant qu'on pouvait choisir de ne rien dire, mais qu'on pouvait aussi choisir de parler.
Ce fut alors une de celles qui avait l'habitude de ne rien dire, et qui avait peut-être eu besoin de cette impulsion, qui prit la parole.
Elle parla d'une difficulté "éthique" à son travail. Elle divergeait avec ses collègues dans la façon d'aborder un certain aspect, qui était lié au respect ou non, ressentait-elle, de la personne.
Une réunion allait avoir lieu avec ses collègues pour discuter de ce point et prendre une décision, et elle craignait que son point de vue ne soit pas adopté, malgré qu'elle croyait y avoir 90% de chances que si.
Ces 10% de chances négatives la préoccupaient, et c'était en relation avec l'image positive qu'elle pouvait avoir d'elle-même.
Ses collègues avaient les diplômes et les connaissances universitaires, elle-même n'avait que son expérience personnelle.

Ce témoignage incita mon collègue masculin à intervenir à son tour.
Il se trouvait un peu dans la même problématique, dans un autre contexte professionnel et social.
Il s'agissait de faire passer ses idées ACP dans une organisation complètement orientée à l'opposé. Lui aussi n'avait pas fait d'études spécifiques et n'avait pour lui que son expérience, face à des professionnels bardés de diplômes et de connaissances.
Mais un de ces diplômés ne lui avait-il pas dit qu'il n'avait vraiment commencé à apprendre quelque chose qu'à partir du commencement de son expérience dans l'entreprise ?

Une jeune femme prit ensuite la parole pour s'exprimer dans un domaine tout différent : sa vie sentimentale et amoureuse. Comment elle rencontre l'autre dans une relation fusionnelle et passionnée, puis s'ennuie et le quitte.

Cela me renvoya à mon propre comportement amoureux, et je m'exprimai à ce sujet.
Je me sentais loin de l'état amoureux en ce moment, comme si je m'en méfiais, ou le croyais illusoire.
En regardant en arrière, j'avais en effet remarqué que jusqu'à présent j'avais été le plus amoureux de femmes très égoïstes et centrées sur elles-mêmes, préoccupées uniquement par leurs propres besoins, que mon rôle était de satisfaire.
Cela donnait des situations où au bout d'un certain temps je trouvais un déséquilibre, un manque de réciprocité, dans tous les domaines, et où je finissais par ressentir une frustration, un manque, une insatisfaction, qui conduisaient inévitablement à la rupture.

Je me disais qu'il y avait quelque chose d'inadapté, de faussé, dans mon mécanisme de "tomber amoureux", qui me faisait rencontrer des femmes qui dans la durée n'allaient pas m'apporter ce dont j'avais besoin.
Je reliai ce phénomène au peu d'estime que j'avais de moi-même sur le plan de ma capacité à susciter l'amour. Il fallait donc que je compense en étant le "serviteur ", plutôt que d'être simplement moi-même.

Je reliai ce sentiment de mésestime à l'époque où ma mère se mit à vivre avec mon beau-père : J'eus l'impression qu'elle n'avait plus d'yeux et d'oreilles que pour lui, et que j'étais passé à un bien arrière plan.
Pour être digne d'être aimé et considéré, il fallait aussi que je fasse des choses : Que je réussisse mes études, que j'aie les bonnes idées politiques.
C'était bien si je faisais le ménage, la cuisine, etc...
Mais je ne pouvais sans doute pas être aimé pour moi-même, en tant que tel.
C'était du moins ce que j'imaginais. C'était peut-être faux. Je n'ai jamais osé le vérifier.
J'avais trop peur de perdre l'amour de ma mère si je ne me conformais pas à ce qu'elle désirait.
Il m'a en fait fallu tomber gravement malade mentalement pour attirer son attention, et gagner le droit d'être moi-même, à ma propre façon.
C'est du moins comme cela que je comprends maintenant ce qui m'est arrivé.
Il me fallait un motif grave et sérieux (la maladie), pour qu'elle accepte que j'organise ma vie d'une façon différente de ce qu'elle souhaitait. Du moins je le croyais ainsi.
Au moins, quand je suis tombé malade, elle pensait moins à sa politique et elle pensait à moi.

Ce lien entre la mésestime de moi et mon beau père ne m'était pas venu tout de suite.
Il avait fallu d'abord qu'une participante parle d'abord de sa propre mésestime, en relation avec sa soeur qui avait mieux "réussi" matériellement et toujours eu envers elle une attitude de supériorité et de mépris.
Je m'étais dit : elle au moins connaît son "anti modèle" qui la fait se sentir inférieure, mais quel est le mien ?
J'étais fils unique, et ce ne pouvait être que dans la relation avec mes parents.
Cela me parut alors évident.

Après le dîner, il fut question d'aller au cinéma voir "le fabuleux destin d'Amélie Poulain".
On me dit que c'était tordant et que j'allais bien rire. J'y allai.
Je souris, mais ne ris pas vraiment.
Quand je rentrai dans ma chambre, le soir, je sentis avoir besoin d'ingérer des sucreries.
Cela faisait bien longtemps que cela ne m'était pas arrivé.
Je m'interrogeai pour savoir quel sentiment j'éprouvais en ce moment précis.
C'était une profonde tristesse, et plus je m'y plongeais plus c'était une grande douleur.
Je restai longtemps assis sur mon lit, la tête entre les mains, les coudes sur les genoux, sans pouvoir bouger, et je dus faire un gros effort pour me remuer et me coucher.

Le lendemain matin j'eus des difficultés à me lever, comme autrefois quand j'allais mal ; je repassais sans cesse dans ma tête des scènes de ce film.
Au petit déjeuner, j'étais revêche. Quand on m'interrogeait sur le film, je répondais : "j'en parlerai tout à l'heure dans le groupe."
en effet, je n'attendis pas longtemps pour parler.
Je dis comme ce film m'avait renvoyé à mon expérience personnelle de la solitude et de la difficulté à communiquer, à entrer en contact avec l'autre, aussi bien sur les plans personnels que sexuels.
Je m'étais senti fort et tranquille à l'entrée de ce séminaire.
Il n'avait pas fallu gratter beaucoup pour trouver la fragilité et l'angoisse.
Cependant ma sincérité et mon authenticité furent appréciées, et on me dit qu'on aimait les hommes qui savaient se montrer dans leur fragilité.
Cette acceptation de moi tel que j'étais dans ma faiblesse me rasséréna et me fit m'accepter moi-même. J'avais comme l'impression d'une vision plus élargie de ce qui m'entourait. Comme si mon champ de vision n'était plus limité par le cadre de mes verres de lunettes. D'ailleurs, je les enlevai pour mieux me rendre compte que j'y voyais bien plus large.
J'avais parlé de choses très intimes dont normalement on ne parle pas, mais auxquelles on pense tout le temps.
Cela changeait le caractère oppressant de ces choses d'en avoir parlé, et qu'il ne me soit rien arrivé de fâcheux, au contraire.
C'est le privilège qu'offre ces groupes, pouvoir y dire des choses qu'on ne peut absolument pas dire ailleurs, même à sa famille et ses amis.
Cependant j'exprimai que moi aussi, comme dans l'exemple de vendredi, j'éprouvai de la honte à m'être peut-être trop dévoilé.
Même si rationnellement je savais que cela avait été parfaitement accepté, je ne pouvais m'empêcher de façon irrationnelle d'imaginer des jugements dans la tête des autres.
Dire cela me fit du bien aussi.
J'exprimai aussi ma difficulté à recevoir des retours positifs de la part des autres.
J'en étais très gêné, ma modestie naturelle en prenait un coup.

Une autre participante exprima la même chose, mais en s'adressant directement à la personne qui venait de le faire, qui se sentit du coup rejetée, et réagit avec un petit temps de retard par une grosse crise de pleurs et de colère.
C'était vraiment la petite fille qui s'exprimait, dans sa douleur d'être rejetée dans ses élans par ses parents, ainsi qu'elle s'en expliqua ensuite.

Ce séminaire arriva à sa fin et nous nous fîmes les au revoir habituels, soit très proches, soit plus distants, nous disant que la prochaine fois n'était pas bien loin.

Troisième session intensive

Ce séminaire eut lieu à nouveau à Habère Poche.
Nous y avions pris nos habitudes, et nous sentîmes à l'aise et en bonne communication dès les premiers instants.
Nous étions heureux de nous revoir.

Nous parlâmes de nos progrès et de nos difficultés dans la relation d'aide, spécialement difficile avec nos proches.
Je fis part des progrès personnels que cette formation m'avait permis de faire, et de la nouvelle perception que j'avais de moi-même, à travers les relations positives et profondes que j'entretenais, à ma grande surprise, avec de plus en plus de personnes.
Comme si, à travers ces nouvelles relations, je me composais un nouveau "moi".

Une bonne moitié des participants désira développer activement ses capacités en ACP par des ateliers spécifiques d'entraînement "réponses thérapeutiques" ou "laboratoire d'empathie".

Leur désir sera naturellement exaucé par les facilitatrices, qui se relaieront pour animer ces ateliers de travail spécial, pendant que le reste du groupe fonctionnera en "petit groupe", ou en "groupe à thème".
Pour aider Olga était venue Josette, pour la deuxième fois.

Pour ma part je préférai rester dans les "petits groupes", où le nombre réduit de personnes permet une expression plus personnelle et profonde.
Je sens plus le besoin de continuer d'évoluer à l'intérieur de moi-même, que de perfectionner une technique d'inter action avec le "client", que pour l'instant je ressens comme "extérieure".
Il m'est primordial d'améliorer d'abord "qui je suis".

Si bien que lundi après-midi je me retrouvai seul avec une autre participante à vouloir faire un "petit groupe". Les autres étaient intéressés soit par "groupe à thème" ou "laboratoire d'empathie".

Nous décidâmes de faire notre petit groupe seulement à deux, et allâmes nous isoler dans le parc sous un arbre.
J'avais remarqué depuis le début de la session que ma partenaire était en retrait. Elle ne s'exprimait pas, et ne semblait pas non plus porter de l'intérêt aux autres. Elle ne semblait pas non plus spécialement sereine.
Depuis le début de la formation je m'étais beaucoup attaché à cette personne, et j'étais heureux de me retrouver seul avec elle, me sentant à même de lui dire en confiance des choses très personnelles, et désireux réciproquement de lui donner la meilleure écoute possible.

Elle me dit ne pas avoir envie de parler. Je l'avais remarqué.
Elle commença à m'interroger pour que je lui parle, mais cela ne correspondait pas à mes préoccupations du moment, et ce qui me préoccupait demandait une écoute très spéciale.
Je ne pouvais lui en parler vu l'état où je sentais qu'elle se trouvait.

J'éludai ses questions et elle accepta de me faire part de ce qui la préoccupait en ce moment. Ce faisant elle pleura beaucoup, et c'était pour ne pas pleurer devant tout le monde qu'elle se retenait autant que possible de parler.
Elle me parla longtemps, heureusement que l'après-midi était longue.
Nous ne prîmes pas de pause et continuâmes d'un trait jusqu'au dîner.
En fin d'après-midi, son ton et ses thèmes changèrent : il s'agissait manifestement à présent de choses agréables, positives, qui lui donnaient plaisir et bonheur.
Je me dis qu'elle avait évacué son mal-être, et qu'à présent elle devait être disponible pour me donner à son tour son écoute.

C'était en effet le cas ; la confiance qu'elle m'avait faite en me parlant d'elle nous avait rapprochés ; dès le début nous nous étions tenu la main, ce qui avait amplifié la sensation de proximité.

Me sentant très en confiance, je lui parlai de choses intimes que je n'avais pas osé aborder en grand groupe, et dont je sentais que si je pouvais en parler à quelqu'un, peut-être elles pourraient s'améliorer.
Je crois qu'il faut arriver à parler de tout.
Même ce qui est tabou, dont on ne parle jamais à personne.

Je me sentis très compris et soutenu, rien que par l'attitude, la chaleur, et sans doute l'amour de cette personne.
Je compris que mon problème n'entraînait pas un rejet, ou du mépris de sa part, et ressentais son acceptation et son envie très forte de m'aider.

Je sentis alors comme si mon univers s'élargissait, s'ouvrait, à partir de mon corps qui s'ouvrait lui aussi, au niveau du plexus, se redressait au niveau de mon dos et de ma poitrine, et devenait plus sensible à son environnement.
C'était une sensation quasi extatique.

J'allai avec les autres au restaurant, restai un moment debout devant la table où tout le monde s'installait, puis décidai de ne pas troubler cet état en mangeant et participant à des conversations trop décalées, et je ressortis pour m'installer sur un banc face au parc et à l'horizon, fait dans un premier plan de montagnes verdoyantes (forêts et prairies), et dans un deuxième plan des hautes montagnes pierreuses aux neiges et glaces éternelles.

C'était un spectacle propre à la contemplation, et adapté au sentiment de communion avec l'univers que j'éprouvais à ce moment.

Je restai ainsi au moins une heure, délai qui me permit de revenir à un état plus ordinaire et d'être disponible aux premières personnes qui avaient fini de dîner et venaient fumer là leur cigarette.

Les "laboratoires d'empathie" occupaient les participants pour la journée.
Bien que cela ne soit qu'un exercice, ils donnait lieu à des échanges personnels, qui pouvaient amener à des prises de conscience importantes, et/ou faire remonter des sentiments très lourdement chargés de souffrance, si bien que le temps imparti ne suffisait pas à traiter complètement ce qui avait surgi.
Ainsi un groupe de trois revint dans un état très déstabilisé, et chacun des trois dut parler dans le grand groupe de ce qui lui arrivait, afin de pouvoir terminer le "travail" qui s'était mis de lui-même en chantier lors du laboratoire.

D'autres groupes revinrent épanouis et joyeux, pour eux, le cadre du laboratoire avait suffi.

Lors de chaque rencontre, chacun évoque plus ou moins son activité professionnelle, et nous savons à peu près ce que chacun fait.
Ce qui se passe au travail fait partie pour une grande part des échanges que nous avons entre nous.
Mais cette fois ci cela se fit d'une façon beaucoup plus approfondie pour deux d'entre nous, qui firent une sorte de rapport de leur récente activité professionnelle.
Ce fut fort passionnant, car nous n'avions pas jusque là eu conscience de la nature exacte et de la profondeur de leur engagement, et par suite nous eûmes l'impression de beaucoup mieux les connaître, et les apprécier.

La première était au début de son activité professionnelle, avec une qualification de psychologue, et s'était engagée dans la relation d'aide aux personnes en difficulté, au sein d'une association.
Elle avait préféré une activité peu rémunérée mais riche de sens à des situations mieux "établies" qu'on lui avait proposées par ailleurs.
Elle venait tout récemment de faire l'expérience d'une mission humanitaire au Sénégal et c'était là l'objet principal de son témoignage.
Elle y était allée gratuitement et en payant elle-même ses frais de voyage, mais s'était tellement trouvée enrichie humainement de cette expérience, qu'elle avait le sentiment d'avoir trouvé dans cette voie sa vocation.
Elle y retournait ces jours prochains pour un nouveau séjour de 3 semaines y enseigner des rudiments d'informatique.

La deuxième, éducatrice spécialisée auprès d'enfants retardés, riche déjà d'une longue expérience professionnelle, nous fit part de son "projet pédagogique". En clair, comment s'y prenait elle avec ses enfants très difficiles, pour les amener à un comportement socialement acceptable, par l'acquisition et la maîtrise de compétences, en cuisine et arts ménagers notamment, mais aussi peinture, dessin, bricolage, écriture, etc...

Je fus frappé par la rigueur de sa méthodologie pour enseigner les gestes de base, qui me fit penser à la façon dont mon professeur Daniel Toutain, ainsi que moi-même, par voie de conséquence, enseignons l'Aikido.
En Aikido, toute personne qui débute est un peu elle aussi comme une handicapée. Personne ne peut faire d'emblée les mouvements montrés par le professeur : il faut qu'ils soient décomposés et montrés morceau par morceau, répétés sans cesse pour être mémorisés et perfectionnés.
L'élève a souvent besoin d'être guidé physiquement par le professeur, comme on le ferait pour un aveugle.
Je fus fasciné par cet exposé.

Cet après-midi fut demandé un groupe à thème sur la culpabilité.
On peut se sentir coupable pour des tas de raisons, et je me sens peu coupable d'ordinaire, sauf sur un thème, la sexualité, et ce sujet fut inévitablement abordé.
Je pus donc parler à un public plus large que précédemment, lorsque j'étais dans mon mini-groupe composé de seulement deux personnes, et justement d'en avoir parlé avant à une personne me rendit plus facile d'en parler à plusieurs.
J'eus à nouveau la sensation d'être accepté dans ce que je vivais comme une singularité, et cela me procura beaucoup d'apaisement.
Les échanges que nous eûmes à propos des particularités des hommes et des femmes me rassurèrent quand à l'adéquation de mon comportement en amour, même s'il ne ressemblait pas à celui de la plupart des hommes.

Le lendemain matin je crus être ignoré par la partenaire qui m'avait si bien écouté au groupe de deux, et cela fit monter en moi une tristesse qui s’avéra quoi que je fasse de plus en plus envahissante.
Je ne pouvais rester ainsi et je décidai en fin de matinée d'en parler en grand groupe. Je racontai comment dans le passé mon extrême sensibilité m'avait occasionné de grandes souffrances, et comment la seule solution que j'avais trouvée jusqu'à présent pour y remédier avait été de me replier sur moi-même, et d'enfermer cette partie sensible de moi-même dans une véritable chambre forte intérieure.

Je ne désirais plus reproduire ce mécanisme. Lors de mon entretien avec ma partenaire, je m'étais ouvert, et je sentais que je commençais à me refermer. Je tentai d'en parler au groupe, pendant que c'était encore entr'ouvert.
Autrefois, je fonctionnais ainsi, car je n'avais personne à qui m'en ouvrir.
Je tente donc un nouveau mode de fonctionnement, en faisant part au groupe de ce que je vis en moi.

Je n'eus pas de réponse de la personne intéressée, qui était pressée de rentrer chez elle (nous avions l'après-midi libre).
J'étais cependant soulagé, mais pas complètement.
A la fin du repas de midi le lendemain, je lui demandai de lui parler.
Elle n'avait pas compris, la veille, être impliquée dans ce que je disais, car je ne l'avais pas nommée.
J'avais mal interprété son attitude, qui n'était causée que par le souci que lui procurait un membre de sa famille.

Je me sens donc à nouveau heureux et joyeux, et le soir j'arrive à danser avec un réel plaisir pour la première fois de ma vie.

L'après-midi a été consacré à la crainte de dispersion et de "clanification" du groupe qu'éprouvent certains, face à la multiplication, lors de cette session, des groupes de travail, et du non-retour des expériences diverses au sein du grand groupe.
Une ferme opposition émerge contre l'obligation de rendre compte dans le grand groupe ce qui se serait passé ailleurs. Liberté avant tout.
Par contre un consensus apparait pour permettre à ceux qui le désirent de partager comment ils ont vécu leur expérience, sans forcément en détailler le contenu.

Le samedi matin sur le thème du suicide et de la mort surgit celui de la spiritualité, thème que j'avais aussi voulu aborder, sans avoir osé le faire.
J'expose comment j'ai découvert la spiritualité sans l'avoir voulu, à travers le Katsugen , comme une sensation, une perception.
Je racontai aussi mon accompagnement dans l'aventure spirituelle de Marianne Dubois.

Le séminaire touche à sa fin et il est déjà question du départ.
Une vive discussion s'engage entre deux participants pour s'accorder sur l'heure du départ le lendemain matin.
Ils ont manifestement d'autres choses sous-jacentes à régler entre eux, car tout l'après-midi leur est consacré, dans un climat intense et ressenti comme très lourd par certains, dont une ne peut supporter et sort de la salle.
Après explications tout s'arrangera, mais cet épisode marquera que beaucoup dans ce groupe ont évolué intérieurement vers plus d'autonomie et d'individualité, et affirment plus fermement leurs positions.

Le lendemain dimanche j'ai malheureusement le même sentiment de tristesse que l'autre matin pour les mêmes raisons, et là je me rends compte que je n'aurai pas le temps de m'en expliquer avec la personne intéressée, qui va partir plus tôt avant le déjeuner.

Je décide donc de me lancer et d'en parler en grand groupe, car je ne veux absolument pas rentrer chez moi avec ce triste sentiment sur le coeur.
Peu après que j'aie fini, elle quitte le groupe sans rien dire, alors qu'une autre avait pris après moi la parole,
J’espérais une réponse de sa part, comment pouvais-je comprendre celle là ?
Je pouvais tout imaginer.
Beaucoup se levèrent, les uns après les autres, pour la rejoindre.
Ce fut la pause, et quand elle revint avec les autres, elle ne vint pas vers moi.
J'insultai une participante qui me demanda si j'allai bien. Elle vit que non.
A la reprise je pus encore en parler et prendre de la distance avec mon sentiment de douleur. Toutes celles qui étaient allées la rejoindre ne me disaient rien évidemment de ce qu'elle avait pu leur dire.
Quand elle vint dire au revoir pour partir je m'étais heureusement calmé et pus stoïquement me laisser faire la bise d'adieu, sans toutefois avoir le courage de la lui rendre. J'ai horreur d'embrasser dans le vide d'habitude, mais c'est ce que je fis pour une fois.

Ce fut enfin au tour de tout le monde de partir.
J'aime d'habitude ce moment car on se serre très fort les uns contre les autres, et cette fois-ci j'appréciai encore plus, vu mon besoin de consolation.
On fut très câlin avec moi, et je fus rasséréné, au moins pour le moment

Sixième séminaire de WE

J'ai d'abord besoin de dire comment j'ai passé la période intermédiaire entre les deux sessions.
J'ai vite tenté de communiquer par mail avec la personne avec qui je me sentais en manque de dialogue.
Après quelques échanges, elle a pu m'expliquer ce qui s'était passé en elle : Je n'étais pas rejeté.
C'était comme je l'avais supposé : trop d'émotion pour pouvoir s'exprimer devant tout le monde sans tomber en larmes, ce qu'elle ne voulait pas.
Mais pour être vraiment rassuré, j'avais besoin qu'elle me le confirme avec des mots.

C'était la période des vacances d'été : J'ai vite laissé tomber la pratique de l'Aikido pour m'occuper de mon verger, puis mes petits enfants et ma fille aînée sont venus, et je suis allé à la plage avec eux.
J'ai particulièrement remarqué la qualité de ma relation avec ma fille, c'était la première fois qu'elle était aussi facile, agréable et spontanée.
Cela m'a apporté le plus grand bonheur, j'avais l'impression de la retrouver comme lorsqu'elle était petite fille, comme s'il n'y avait jamais eu de coupure entre nous (je l'avais perdue de vue de nombreuses années, suite à mon divorce d'avec sa mère).

Mon anniversaire a été fêté joyeusement, avec mes trois enfants, mes quatre petits enfants, et ma mère.

Je fus surpris d'aller au stage d'Aikido du mois d'Août sans enthousiasme.
Je suis d'habitude très excité et impatient d'aller à ce stage.
Je remarquai aussi que malgré mon absence de pratique, mon moral était bon, excellent, même.
Cela était tout à fait nouveau, car d'habitude quand je ne pratique pas l'Aikido, je déprime.
Il joue pour moi le rôle d'euphorisant naturel.
J'en conclus que j'allais sans doute beaucoup mieux intérieurement, et que je n'avais plus besoin de cette béquille.

Aussi j'arrivai à ce séminaire serein et plein de chaleur.
Le lieu avait changé : un centre de formation et de loisirs au bord de la forêt de Fontainebleau, près de Melun.
Très agréable, beaucoup plus convivial, intime et chaleureux que le CREPS où nous allions précédemment.
Nous nous sommes tout de suite sentis à l'aise et en bonnes dispositions pour profiter pleinement de notre stage, tout de suite "dans le bain".
Alors qu'au CREPS il nous fallait une longue période d'adaptation, carrément la première journée, pour avoir la sensation de nous retrouver vraiment, d'être entre nous.
Il y avait un réel gain de temps et d'efficacité, de plaisir aussi, et nous avons demandé à notre organisatrice de planifier à l'avenir tous nos stages de W.E. à cet endroit.

Dès le début je fis part de l'état intérieur positif dans lequel je me trouvais, "avant que cela ne disparaisse".
En effet, combien de fois étais-je arrivé en bonne forme, puis perturbé de façon importante par des évènements survenus en cours de stage.
Je me savais très fragile intérieurement.
Mais cette fois-ci, je le dis dès à présent, je ne fus troublé par rien.
C'était comme s'il y avait une certaine distance de sécurité entre moi et les autres.
J'en étais tout étonné. Je ne le faisais pas volontairement, cela était.
Pourtant plusieurs personnes se sont exprimées avec beaucoup d'émotion ; je n'en étais pas troublé.
J'avais l'impression d'être un autre personnage, de ne plus être l'enfant que je m'étais senti être intérieurement jusqu'à présent.
Quelqu'un de plus fort, de plus solide, de plus stable.

En même temps cela m'inquiétait un peu : ne vais-je pas devenir indifférent aux autres, ne vais-je pas m'ennuyer, si je deviens moins émotif ?

Je n'étais plus l'enfant.
Je l'ai ressenti nettement hier à ma séance d'Aikido à Rennes.
J'ai pratiqué avec quelqu'un qui d'habitude me trouble : je me sens avec lui comme un petit enfant, parce qu'il est très fort physiquement, et très directif dans son attitude.
Alors en général je perds mes moyens.
Cette fois-ci cela ne s'est pas produit : je restais calme et tranquille en moi-même.
Ma pratique avec lui n'était pas facile, parce qu'il est beaucoup plus fort que moi, aussi bien physiquement que techniquement, mais je ne paniquais pas, j'assurais bien.
Quand je me sentais trop fatigué, je lui demandais tranquillement une petite pause, qu'il acceptait volontiers (car il est plus jeune et plus endurant que moi).
Intérieurement je me sentais son égal, et même son aîné.
Les pendules étaient remises à l'heure, en quelque sorte.

La première journée fut occupée par les personnes qui avaient eu un problème en fin de stage précédent, et n'avaient pas eu le temps de s'en expliquer entièrement.
Chacune avait fait un travail intérieur dans l'intervalle, et s'expliqua sur son cheminement et son état présent.

Le soir après le dîner il faisait beau, et nous partîmes à quelques-uns en ballade dans le parc laissé à demi-sauvage, ce qui le rendait charmant et plein de mystère.
L'une d'entre nous exprima sa peur de la forêt.
Dejà dès le départ elle hésitait à nous accompagner, prétextant un avertissement des eaux et forêts affiché sur la porte d'entrée, qui mettait en garde sur les dangers de chutes de branches suite à la tempête de fin 1999.
Nous nous moquâmes gentiment d'elle et l'entraînâmes avec nous.

Le lendemain en séance elle dut nous faire part de son malaise suite à cette ballade.
Notre petit groupe lui avait rappelé ses frères et soeurs et sa place dans la fratrie, où elle se trouvait seule, incomprise et moquée.
Un très fort sentiment de détresse lui était remonté.
Certains de notre groupe furent frappés de n'avoir pas perçu le réel malaise de notre amie au moment de la ballade.
Et se reprochèrent d'en avoir rajouté en se moquant d'elle.
Ils n'étaient pas satisfaits de leur capacité d'empathie.

Pour ma part j'estimai que nous nous étions comportés normalement car nous n'étions pas alors dans une relation d'aide, et que l'important était que nous soyons capables d'être à présent réceptifs à l'expression de sa détresse, après coup.

Comme par hasard, le dernier jour, une énorme branche d'arbre tomba vraiment, juste devant la fenêtre de notre salle. N'était-ce pas curieux ?

J'exprimai à mon tour mon inquiétude quant à la proposition qui m'avait été faite par mon professeur d'Aikido d'assurer les cours dans son école chaque samedi matin.
Certains m'écoutèrent, d'autres me demandèrent des précisions et me firent des suggestions, une dernière enfin exposa ce que cela faisait surgir en elle, et ce fut l'heure du repas.
Je me sentis frustré comme si on m'avait volé ma parole, et pas du tout apaisé.

A la reprise l'une d'entre nous, qui avait souhaité présenter une étude de cas, exprima avoir mal ressenti la façon dont j'avais été écouté.
Elle souhaita que cela ne se passe pas ainsi quand elle présenterait ses cas.
Il y avait spécialement l'intervention d'une personne qui l'avait choquée, elle restait depuis sous l'emprise de cette mauvaise sensation.
Cela était très fort et elle ne pouvait rester comme cela.
Elle choisissait de le lui dire directement.
Cela lui demandait un gros effort et lui causait une grande crainte, car d'habitude elle n'exprimait pas ses sentiments "négatifs", pour être "bien" avec tout le monde.
Cela semblait très fort, et dans tout le groupe planait l'inquiétude du choc imminent.

J'étais certain qu'il s'agissait de la personne qui m'avait "subtilisé" la parole, et j'étais à la fois effrayé et heureux qu'on dise enfin à cette personne ses "quatre vérités".
J'étais aussi soulagé, car ainsi je n'aurais pas à lui dire moi-même tout ce que j'avais contre elle.
Depuis le début de notre formation elle ne cessait de porter des jugements, interrompre des gens et parler à leur place, donner des conseils, mais personne ne lui reprochait jamais rien.
Elle était comme sacrée, car en même temps sensible, généreuse et touchante jusque dans sa maladresse.

Mais à ma grande surprise il s'agissait de quelqu'un d'autre : celle qui m'avait fait quelques suggestions/conseils.
Dans le cas présent, cela ne m'avait pas gêné.
Elle même n'avait pas eu l'impression d'avoir donné vraiment un conseil, plutôt une demande d'information.
Mais cela avait été perçu par notre amie comme une forte attitude conseil.
Cela l'avait mise comme en situation avec sa soeur aînée : inférieure et dominée, la petite fille qui ne trouve rien à répondre.
Elle refusait maintenant ce rapport, avec le désir d'être d'égal à égal.

La force de sa réaction d'aujourd'hui n'était manifestement pas adaptée à la situation réelle dans le groupe, elle en convenait la première, mais à la situation sous-jacente et aux souffrances du passé avec sa soeur.

Ma "coupeuse de parole" exprima qu'elle ne comprenait cependant pas une telle force de réaction.
Qu'elle admettait, mais ne comprenait pas.

On en conclut que c'était moins ce que disait le "counsellor" qui importait, mais plutôt la façon dont le client le recevait.

Le client pouvait avoir des réactions à priori incompréhensibles au counsellor, mais il n'était pas indispensable de comprendre, il était important de recevoir.

Je me devais moi aussi d'avoir le courage de parler de mon mal-être, suite à ma prise de parole du matin.
Mon interlocutrice admit volontiers qu'elle m'avait interrompu et pris la parole à ma place, et s'en excusa.
Cela ne fit donc pas un drame comme je l'avais craint tout d'abord.
Elle me dit être consciente de faire souvent cela, et me demanda de la reprendre quand cela se reproduirait.
Mais cette demande ne me satisfaisait pas.
J'aurais préféré qu'elle ne m'interrompe pas et ne pas devoir lui reprendre la parole.
Je n'aime pas imposer ma parole, cela montre qu'il n' y a pas vraiment d'écoute en face.
Toutefois mon mal-être disparut, ainsi que mon inquiétude à propos de mes cours d'Aikido du samedi matin.

A la reprise, notre amie (Jeanne) nous exposa son cas :
Il s'agissait d'une jeune femme insatisfaite de son emploi, en dessous de ses capacités et de sa formation.
Mais tous ses entretiens d'embauche tournaient court.
Ses interlocuteurs lui renvoyaient d'elle une image négative, ce qui lui suscitait souffrance et rancoeur.
Elle était venue sur le conseil d'une amie qui après une série d'entretiens d'aide avec Jeanne avait pu trouver l'emploi de ses rêves.
Mais après plusieurs entretiens, Jeanne doutait de pouvoir l'aider.
Auparavant elle était elle-même recruteuse, et avait déjà reçu cette personne comme candidate, sans la retenir.
En parlant de son cas, elle prit conscience qu'elle était bloquée dans sa faculté d'aide par la confusion des deux rôles : recruteuse et thérapeute, plutôt contradictoires.

Le deuxième homme du groupe était jusque là resté sur la réserve.
Il exprima qu'il se tenait en retrait, comme empêché d'exprimer sa spontanéité.
Cela était consécutif aux vifs échanges qu'il avait eus à la fin du séminaire précédent, qui lui avaient donné la sensation d'être jugé et mis à l'index.
Il put alors relier cela à l'épisode de son enfance où on avait interdit à son meilleur ami de continuer à le voir, sans explication.
Il était devenu soudain "mauvaise fréquentation".
Il n'avait pas compris ce qui chez lui avait pu provoquer ce rejet, et cela l'avait plongé dans la plus grande confusion.
D'avoir fait ce lien l'apaisa, et son visage s'éclaira de nouveau.

Nous étions à la fin du séminaire.
Certaines d'entre nous devaient prendre rapidement le train, et les embrassades de la fin furent écourtées, ce qui laissa quelques un(e)s sur un sentiment d'inachevé.
Nous nous promîmes pour la prochaine fois de faire attention d'avoir tout notre temps.